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> dimanche 17 mars 2024

 

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Théâtre d'impro

 

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1 mardi sur 2 19h30-21h30

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D’un fil à l’autre (retour sur la séance du 30 septembre 2020)

par Astrid Giorgetta

 

Ce soir comme les autres soirs des mercredis de l’impro, je me sens reconnaissante, reconnaissante envers moi-même, envers les participant/es et en même temps frustrée par mes limites et par les limites du cadre, du temps, de l’espace.
Je m’explique ; certainement par l’expérience de toutes ces années où j’ai reçu nombreux enseignements en danse, en théâtre, en clown et aussi grâce à celles où j’ai moi-même transmis, je me permets de me faire confiance.
Je lâche le stress de la préparation, le stress de ne pas être à la hauteur, le stress d’être « responsable » d’un groupe (car on n’est jamais responsable du groupe). Cela ne veut pas dire que je ne prépare rien ni que j’arrive sans souci de ce défi sans cesse nouveau qu’est de « faciliter » une séance. C’est drôle ce mot qui vient du monde de la CNV, rendre facile une communication entre les corps et tout d’abord dans son propre corps (habiter son corps !), ça remets à sa juste place en toute humilité le « prof ». Puisque dans l’improvisation il n’y a pas de modèle à imiter, pas de chorégraphie à apprendre, juste être mis en disponibilité d’éprouver. Et pour ressentir et « mettre à l’épreuve » notre corps, les chemins sont multiples et chaque chemin mène une qualité de corps différente, à priori. Car il n’y a pas d’à priori, on ne sait pas ce qu’il va se passer et tout cela ne dépend pas que de moi, cela dépend aussi de chaque participant/e et de comment je vais être suffisamment à l’écoute, alignée (pour reprendre un autre jargon) pour naviguer à vue pendant la séance et conduire le groupe.
Alors ce soir c’était un peu spécial
Tout d’abord il y a quelques jours cette 1ère annonce de fermeture par le CMA et mon sursaut pour trouver des lieux pour nous accueillir avec l’idée d’explorer l’extérieur (et la contrainte de la température qui baisse et l’impossibilité de faire une pause pipi dans les bars tous fermés) et une magnifique proposition d’une structure voisine. J’imagine le RAID, Réseau Amical d’Improvisation Dansée. Puis après plusieurs échanges d’emails et une discussion avec la mairie il est finalement possible de maintenir une activité théâtrale, attention aux mots ! à condition d’être masqué et à distance pendant toute la pratique. Ca tombe bien sur la page d’accueil de la Cie Pica Pica il est écrit Théâtre tout-terrain.
Et je me dis OK on reste au CMA encore cette semaine, on discute de comment on pratique et la prochaine fois on se déplace sur le nouveau lieu qui nous tend les bras. Ce soir je monte direct au 3ème étage et je suis rejoint par le jeune homme de l’accueil à qui j’ai donné mon bonjour masqué en entrant. Il me dit que les activités adultes sont interdites et donc je dois lui expliquer que nous ne faisons pas une activité sportive et que c’est OK avec la mairie puisque c’est du théâtre. Il repart et me revient un 2ème qui me dit la même chose mais est en même temps au téléphone avec quelqu’un (la personne de la mairie à 18H30 ???) qui lui dit que c’est OK en même temps que moi, ouf !!! Donc la séance va pouvoir commencer.
Et cette dernière séance sur la thématique « habiter son corps » que j’avais prévue avec un focus sur les articulations et le mouvement articulé, dissocié s’était transformée dans mon esprit sur un travail en rapport avec nos limites, nos impossibilités sociales et corporelles. Juste avant la séance j’avais pris des bouts de laine coupés à 1m20, des scotchs, des feuilles et des feutres pour écrire…
Et la séance commence
Je ressens le besoin des corps de se poser, se déposer sur le sol, chacun dans son espace, pour trouver la détente et faire la paix avec ce cadre qui tente de nous empêcher. Nous sublimons collectivement ! La sublimation c’est notre capacité à transformer en positif un accident, une contrainte.
Je laisse ce temps précieux pour se retrouver avec soi-même, son propre corps et toutes ses sensations. Nous plongeons dans notre liquide synovial et mobilisons en douceur toutes nos articulations des plus petites (phalanges) aux plus importantes (hanches, épaules). Tout en visualisant nos espaces intérieurs nous imaginons que nous flottons dans une bulle remplie de liquide amniotique. Nous explorons cet espace entre intérieur et extérieur proche de nous, notre zone d’intimité, notre corps énergétique. Puis nous faisons circuler cette bulle protectrice dans l’espace tels des Jedi, en ouvrant les yeux sur les autres bulles-cellules, toutes indépendantes et en même temps toutes reliées, des cellules d’un même grand corps collectif (la prochaine thématique !). Nous éprouvons l’impact du mouvement et de l’énergie d’une cellule sur les autres et faisons le choix de notre réponse, est-ce que ma cellule est contaminée et copie ou bien continue t’elle son chemin avec cette conscience-là d’autonomie ?
En accompagnant le groupe j’ai conscience de ce parallèle entre le micro (les cellules qui nous constituent) et le macro (le corps social), c’est tellement juste !
Lorsque je facilite la séance, je fais confiance dans ma capacité à improviser, à ne pas prévoir, à être dans l’instant présent : être à l’écoute des besoins, tisser le fil conducteur au fur et à mesure de la proposition, adapter, réajuster, régler les énergies pour calmer ou dynamiser, ressentir le moment juste pour changer et passer à autre chose, faire des pauses et échanger sur le processus.
Pour moi les temps d’exploration sont des matières vivantes alimentées par chacun et qui par résonnance vont modeler la séance. Car finalement même si je prévois une thématique et une manière de l’aborder, je sais que je peux tout laisser de côté, abandonner la volonté pour m’en remettre à mon ressenti et à mes ressources.
C’est le moment de (re)prendre le fil !
La moitié du groupe accroche un morceau de laine à chaque membre et nous explorons par deux la marionnette active (pas inerte !) et à l’écoute de son manipulateur qui tire les ficelles au sens propre. C’est drôle je trouve toujours très agréable la sensation d’abandon du manipulé (étymologiquement laisser son pouvoir à l’autre), c’est comme un lâcher-prise et une confiance qu’on offre, on fait cadeau de son pouvoir mais on garde son autonomie et le choix d’écouter ses besoins aussi pour ne pas se mettre en danger. On lâche donc le mental et on laisse le corps faire et suivre les impulsions, on se laisse surprendre et c’est jouissif !
Et puis parce qu’on a besoin de trouver l’équilibre et la liberté on explore le duo « interactif » : où chacun est relié par les fils de laine aux doigts et garde la tension yeux fermés sans savoir qui guide et qui est guidé. Ce sont de magnifiques duos aux énergies différentes qui cherchent à s’accorder.
Une apparition soudaine de l’homme de l’accueil qui nous rappelle que nous terminons dans 5 min !
Et nous terminons par un petit temps d’échange et pleins d’idées et d’envies pour continuer la prochaine fois et tisser un fil entre nous tou/tes comme si ce besoin d’être relié, pas seulement par la toile internet se faisait encore plus nécessaire physiquement : sentir que nous avons des corps sensibles et que nous avons besoin de ce lien physique.
A suivre !